Un certain nombre
de catholiques français, qu’il ne faut pas confondre avec l’Église
catholique qui est en France, sont, sans le savoir, fidèles à une
tradition qui vient de très loin, bien avant la Révolution française.
Ils se laissent déterminer de l’extérieur, par ce que le général de
Gaulle appelait les « circonstances » de la vie politique. Ils
sont pris dans des rapports de force qui leur échappent, mais en
fonction desquels ils rêvent d’affirmer leur identité, de façon
militante, soit en se défendant contre ceux qui les contestent, soit en
participant à des manœuvres offensives, espérant retrouver ainsi des
positions dominantes dans notre société.
Cette posture militante,
cette culture de combat n’est pas nouvelle. Elle correspond à cette
longue tradition qu’Émile Poulat, René Rémond et bien d’autres
historiens ont désignée comme celle du catholicisme intransigeant qui
s’est développée tout au long du XIXe
siècle, pour résister à tous ceux qui semblaient hostiles à l’autorité
de l’Église. Cette interminable guerre des deux France s’appuyait sur
des idéologies consistantes, d’un côté celle qui inspirait le parti
clérical, et de l’autre celle qui accompagnait la naissance et
l’affirmation du projet laïque.
On peut toujours rêver de
réveiller ces vieilles querelles, en invoquant d’un côté le programme de
l’Action française de Charles Maurras et de l’autre les réalisations de
Jules Ferry ou les idées de Ferdinand Buisson, sans parler de la
rivalité entre les curés et les instituteurs. Mais c’est peine perdue.
Parce que les idéologies qui soutenaient ces projets politiques sont
mortes et que personne ne peut les ressusciter, à moins de faire le
choix, du côté catholique, d’un enfermement dans des réseaux serrés qui
se réclameraient d’une foi pure et dure et, du côté laïque, de la remise
en valeur d’une morale fondée sur des valeurs abstraites.
(...)
Quant
aux responsables de l’Église catholique en France, dont je suis
solidaire, ils seraient mal inspirés s’ils cherchaient à prendre en
marche le train des poussées politiques, en essayant de faire plaisir
aux ultras et aux autres. Si cet opportunisme l’emportait, il faudrait
en payer le prix dans quelques années. Je suis préoccupé, parce que j’ai
parfois l’impression que la joie provoquée par l’élection du pape
François est estompée par les crispations actuelles et que la référence à
la simplicité et à la force de l’Évangile s’atténue !(...) Ce n’est pas de calculs politiques que nous avons besoin,
c’est du courage d’être nous-mêmes, des disciples et des témoins de
Celui qui est venu pour « chercher et sauver ce qui était perdu » (Luc 19, 10) et aussi pour « réunir les enfants de Dieu dispersés » (Jean 11,52).
Une remarquable synthèse sur ce sujet se trouve sur le site "Penser le genre catholique" qui met en perspective la lettre de Mrg Dagens, avec:
un édito de Bruno Frappat dans La Croix:
"L’Église s’est beaucoup avancée sur ce dossier. Ses raisons ne sont pas
secondes ni injustifiées. Mais en laissant les fidèles se faire
approcher par les sirènes politiciennes des droites, et cheminer en
traînant dans leur sillage les brigades de l’ultra-droite (quitte à se
pincer le nez), elle a pris un risque. Elle a accompagné, sans se rendre
compte ni évidemment le vouloir, un « retour du refoulé » de
l’homophobie (celle-ci s’étale sans honte sur les forums de l’Internet).
Elle a pris le risque d’être instrumentalisée par des officines plus
proches de l’intégrisme que de la fidélité à Rome. Surtout, elle aura
fourni mille et un arguments aux anticatholiques primaires qui, depuis
des lustres, trouvent en elle l’incarnation de la réaction."
et une interview de Jean-Louis Bourlanges:
"Il y a quand même un très grand précédent historique qui doit nous
hanter : c'est celui de l'Affaire Dreyfus. Au moment de l'Affaire
Dreyfus, la droite opportuniste, républicaine et modérée (...) était
partie pour diriger le pays jusqu'en 1914. Et l'Affaire Dreyfus, qui est
quand même un fait divers, a cassé complètement ce mécanisme. Une
partie de la droite s'est mise dans une espèce de réaction pour l'Armée,
pour l'Église, contre les juifs, sur le fond d'anti-modernisme du pape.
Ils se constitués. Du coup, le parti au pouvoir opportuniste s'est
rompu (...) et la gauche a dominé la vie politique française pendant 15
ans. Mais cette cassure sur l'Ordre moral c'est un vieux démon de la
droite depuis 1830, depuis l'Affaire Dreyfus et qui ré-apparaît
aujourd'hui sans qu'il soit possible d'en mesurer les conséquences..."
Voici pour finir des propos lus et entendus durant ces manifestations:
«Ce qui se passe aujourd’hui est aussi grave que ce qui a été fait
pendant la Seconde Guerre mondiale. Il n’est pas pire d’obliger
quelqu’un à porter une étoile jaune que de priver un enfant d’un papa et
d’une maman»«même si on n’a rien contre les homosexuels». «Il est
inconcevable que des personnes stériles de fait puissent se marier et
demander des enfants» le mariage, c’est «l’union entre un homme et une
femme en vue de procréer» il faut défendre «l’ordre naturel»
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