vendredi 26 avril 2013

Heureux ceux qui ont le coeur pur, car ils verront Dieu!

« Le Christ, dans son enseignement, paraît ne s’être jamais inquiété de nos goûts singuliers. Il ne lui importe aucunement de connaître les bizarreries de nos inclinations. Son exigence, sa terrible exigence, et qui est la même pour tous, c’est que nous soyons purs, c’est que nous renoncions à notre convoitise quel qu’en soit l’objet La réprobation du monde à l’égard de l’homosexualité, et qui est d’ordre social, n’offre aucun caractère commun avec la condamnation que le Christ porte contre toutes les souillures, ni avec la bénédiction dont il recouvre les cœurs qui se sont gardés purs : Beati mundo cordes quoniam ipsi Deum videbunt. »
(Heureux ceux qui ont le coeur pur, car ils verront Dieu! )

François Mauriac, « Les catholiques autour d’André Gide », Hommage à André Gide, NRF, 1951, p. 103-107

mercredi 24 avril 2013

Des revendications religieuses en Démocratie. Suite et fin du débat,sur le mariage pour Tous!

(...)Le fait que des croyances religieuses soient brandies par des minorités pour engager des croisades, montre amplement que la religion et ses adeptes ne respectent en rien les principes démocratiques, c’est-à-dire un système de pondération des passions qui permet aux souverains de chercher les meilleures voies pour résoudre pacifiquement les conflits qui les opposent à d’autres (...)
Malek Chebel - publié le 01/09/2012, Le Monde des Religions.

« Lorsqu’on parvient à la limite du monologue, aux confins de la solitude, on invente, à défaut d’autre interlocuteur, Dieu, prétexte suprême de dialogue. Tant que vous Le nommez, votre démence est bien déguisée, et tout vous est permis. » 
Cioran

lundi 22 avril 2013

La manifestation, les catholiques et les bonnets phrygiens!


"On lache rien!" entonnent les manifestants! Le slogan venant d'un tube d'HK et Samples Saltinbanks alter-gauchos, diffusé en boucle dans les cortèges mélanchoniens et repris sans gène aujourd'hui, de Versailles à Neuilly sur Seine! La musique est chaleureuse, entrainante, et fait vite oublier les paroles et le contexte politique d'origine!
Barjot invite à manifester aux cotés de Melanchon, le populiste d'extrème gauche, après avoir embrassé Maitre Collard, le populiste d'extrème droite hier. 
Jusque là, on n'est pas étonné des affinités politiques et populistes de ce mouvement réactionnaire et conservateur. Je pose la question aux manifestants guillerts:  sentez-vous poindre une confusion? Celle de marcher dans la rue, à droite, avec des symboles très ancrés à gauche? Celle d'une France républiquaine et démocrate appaisée mains dans la main avec des partis extrémistes et populistes?

"Nous devenons des pros de la manifestations, alors que nous n'avions jamais manifesté", entend on sur les ondes. La rue exutoire des rancoeurs (élections perdues, non représentativité proportionnelle parlementaire) devient le modèle  d'expression et d'action pour ces gens, aux visages si dociles en apparence. Cette rue criarde que  les gens de Droite, pourtant haïssait...
L'anti-parlementarisme est une forme de populisme notoire. Rejeter la légitimité de ceux qui nous représentent, les députés de notre assemblée  est inquiétant. A ce jeu l'UMP, qui à fait de ces manif un cataliseur politique et un marqueur idéologique adressé à l'électorat extrèmiste, mène le cortège, au propre comme au figuré. Ce montre aussi comme ce sujet dont on me jurait qu'il n'était pas politique est en fait hyper politisé, les organisateurs eux mêmes créant leur parti et iront proposer des listes aux cantonales! L'UMP n'est pas uniquement porté par ceux qui crient le plus fort. Ceux là, tentent d'exiter pour exister. Comme le disait Marine Le Pen, c'est bien elle qui donne le ton idéologique et les Buissons qui courent après, sans idées, ni projet, la bosse du coup de massue d'une défaite politique et idéologique derrière la tête.

Mais il y a plus étonnant, et des voix s'élèvent enfin. Même au coeur des intellectuels de droite comme l'historien, Jean Sévillia:
"On y voit apparaitre des symboles révolutionnaires. ce qui représentent la Terreur qui a tué tant de gens du clergé et de l'aristocratie:"[...] Le bonnet phrygien, devenu l’emblème du mouvement révolutionnaire en 1790, s’impose fin 1792, son usage culminant jusqu’à la réaction thermidorienne de 1794. C’est-à-dire que ce couvre-chef incarne peu ou prou la Terreur et même la Grande Terreur, qui est sans doute un des moments les plus tragiques de notre histoire.(...)
Quand je vois un bonnet phrygien, je pense à ces prêtres et à ces religieuses que Carrier, à Nantes, déshabillait et liait nus, l’un à l’autre, l’un face contre l’autre pour être précis, sexe contre sexe, avant de les noyer dans la Loire. Ce charmant adepte de l’Égalité appelait cela un « mariage républicain ». Parenthèse : détourner la symbolique du mariage n’est donc pas nouveau… 
"coeur sacré de Jésus" , symbole vendéen contre-révolutionnaire
Quand je vois un bonnet phrygien, je pense à ce curé vendéen à qui des soldats, sans doute partisans de la Fraternité, avaient tranché les deux mains avant de répandre dans l’auge à cochons le contenu du tabernacle de son église. Ce martyr a été retrouvé accroupi devant l’auge, les deux avant-bras collés contre terre afin de tenter d’arrêter l’hémorragie, et lapant dans l’auge, s’efforçant de disputer aux cochons les hosties consacrées. [...]"

"Sans bonnet phrygien, la manif est plus belle..." titre même un site catholique intégriste  visé par une enquète judiciaire  pour connaissances et avoir diffusé  des informations trop précises sur les déplacements des ministres , dans le cadre des actions quotidiennes militantes (cf, le journal du Dimanche de ce week-end).

Le comble de l'ironie et la confusion des symboles poussée au paroxysme est le  bonnet phrygien rose. Rose "gay friendly" attitude. S'attirer la sympathie des téléspectateurs. Camoufler le rouge sang du bonnet par une couleur guimauve,  enfantine, naïve. C'est camoufler le réel d'une violence de l'inégalité en droite et devoir et c'est camoufler l'inversion des symbôles.
Aussi, Barjot invite l'UOIF à manifester. Là aussi, il y a pour l'opinion des manifestants, une confusion incroyable. Marcher à coté de femmes en Niqab? Les inviter dans la rue? (alors que la veille on les interdisait de prier dans la rue et exigeait d'enlever leurs voiles pour être conformes  aux traditions françaises et de  notre laïcité... Belle intégration! Conforme finalement avec les opinions qui se ressemblent...

Avec les appels au sang de la "Rigide Fardeau"(regrettés après, mais est-ce  responsable et suffisant?), on se demande si les cathos utiliseront la guillotine comme symbole de leur combat en Mai prochain!
Le mélange des symboles vendéens et révolutionnaires est inquiétant. Pauvreté des slogans, arguments, une confusion des symboles qui révèle une perte de sens et donc des valeurs.

C'est une régression civilisationnelles que de voir des gens de valeurs catholiques utiliser des arguments et des symbôles païens révolutionnaires. Inviter l'extrème droite c'est inviter des valeurs du néo-paganisme occidental, dans toutes ses composantes contradictoires (régionalistes, nationalistes (avec ou sans l'Europe) sociales nationalistes, royalistes avec Maurras).
Le rassemblement de la "Nouvelle Droite" et de "l'Ancienne Droite", sur les braises de la Révolution, catarsis de la perte de sens et des valeurs de cette partie des français.

Documents:

Perversion homophobe de la démocratieEric Fassin(Sociologue, université Paris-VIII) Paru dans LeMonde du 24 Avril 2013.


(...)On assiste donc à l'inversion rhétorique de la démocratie pour expliquer, voireexcuser l'homophobie, qui sort avec virulence du placard républicain.
(...)Une deuxième explication renvoie à la droite. Sous prétexte de contenir le Front national, elle en reprend les thématiques xénophobes et islamophobes. En réalité, au lieu de toucher à l'empire des marchés, c'est l'interprétation qu'elle offre au peuple de sa colère. La lutte contre l'immigration subie fut ainsi la réponse donnée par Nicolas Sarkozy au rejet par référendum du traité constitutionnel européen en 2005. L'identité nationale n'est donc que l'autre face de la politique néolibérale. C'est d'ailleurs faute d'avoir rompu avec les options économiques de la droite que la gauche reconduit sa politiqued'immigration.
Quel rapport avec le mariage pour tous ? La racialisation de la nation qu'entraîne la course vers l'extrême droite a pour corollaire la biologisation de lafamille. C'est une même bataille pour la naturalisation de l'ordre social qui se joue dans les deux registres. Selon le code civil, la filiation ne définit-elle pas à la fois la parenté et la nationalité ? Le langage des origines s'y déploie simultanément ; et comme pour compenser ce lexique de la "souche" ou du "sang" français, de la "vérité" biologique ou de la "vraisemblance", jamais la droite n'a tant parlé de démocratie.
La troisième raison tient à l'ordre sexuel. Pourquoi l'Eglise catholique s'est-elle engagée dans cette croisade, déjà amorcée en 2011 contre la "théorie dugender(sic) ? L'enjeu, c'est la "démocratie sexuelle" – soit l'extension du domaine démocratique, avec ses revendications de liberté et d'égalité, aux questions de genre et de sexualité. L'ordre social est-il tout entier sujet à la délibération démocratique, ou bien peut-on encore y préserver un fondement qui échappe à l'histoire et à la politique ? Pour les Eglises, la question est d'importance : si la société ne se définit plus par une autorité transcendante, mais s'institue elle-même en proclamant son immanence, quel contrôle leur concédera-t-elle ?
Aussi la nature biologique devient-elle le refuge de la transcendance : contre le mariage pour tous, l'ancien grand rabbin Gilles Bernheim avait emprunté (sans guillemets) l'expression "écologie humaine" à Benoît XVI ; en retour, celui-ci l'a cité au moment de défendre les "forêts tropicales" du mariage hétérosexuel. Sans doute cette contre-attaque, qui confond Dieu avec la nature, est-elle paradoxale : si on la croit naturelle, pourquoi redouter l'effondrement de l'hétérosexualité dès lors qu'elle ne serait plus instituée par l'Etat ? Et qu'est-ce qu'une institution naturelle ?
La hiérarchie catholique aurait pu s'engager dans des combats moins partisans. Ainsi, la persécution des Roms est indifféremment menée par la droite et la gauche ; pourtant, nonobstant la charité chrétienne, il n'en est pas question dans les manifestations et prières de rue. Privilégier la lutte contre la démocratie sexuelle, c'était choisir l'alliance avec l'opposition. Or, en l'absence de discours alternatif à gauche, c'est contribuer à saper la démocratie elle-même : la dérive de l'Eglise légitime celle de la droite qui la cautionne en retour. "Agonie de la démocratie" ? Espérons que la farce de l'inversion ne se répétera pas en tragédie.


La radicalisation s'enracine-t-elle à droite? (Dossier paru dans LeMonde.fr)


Le "printemps français", une voie entre FN et UMP
(...)C'est la démocratie représentative fondée sur le contrat social. Dans la critique ci-dessus énoncée, la gauche est attaquée la première mais la droite modérée ne l'est presque pas moins, tant la pensée contre-révolutionnaire et organiciste d'inspiration catholique voit les deux familles politiques comme résultant de la même erreur doctrinale : le libéralisme. C'est pourquoi les groupuscules d'extrême droite, loin d'être les initiateurs et les penseurs du mouvement en cours, ne font que profiter d'un effet d'aubaine pour gagner des militants et de l'exposition médiatique.(...)Nombre d'acteurs de la radicalisation en cours ne pensent pas autrement. Ils se croient en guerre contre la subversion qu'incarne, selon eux, la gauche. Ils répondent avec le langage et, chez les plus exaltés, les velléités d'action propres à la doctrine de contre-subversion que l'ex-Cité catholique a laissée en héritage. Leur fascination pour la déstabilisation du gouvernement, voire de l'Etat montre qu'une certaine droite n'accepte toujours pas que la gauche, même démocratiquement élue, gouverne. Comme si, malgré l'existence d'une alternance depuis 1981, une frange de notre pays continuait à se voir comme seule détentrice de la légitimité nationale, et rejouait sans cesse le combat des "deux France".

 Un climat politique qui rappelle la fin du XIXe siècle, non les années 1930

D'où viennent ces militants qui, à coups de tweets et de SMS, se réunissent et se dispersent comme des volées de moineaux, quand ils ne cherchent pas à dresser leurs tentes devant l'Assemblée nationale ? Parmi eux, quelques nervis de la mouvance identitaire, sans doute, mais beaucoup plus sûrement les lointains descendants d'un catholicisme de combat né à la fin du XIXesiècle en réaction à l'anticléricalisme d'Etat.
DEUX FAMILLES DE PENSÉE
Cette tendance a donné naissance à deux familles de pensée dont on retrouve les héritiers parmi les durs de l'opposition au mariage pour tous. D'une part, le rameau du catholicisme social, d'abord fortement identifié au royalisme et finalement rallié à la forme républicaine du régime – par fidélité au mot d'ordre de Léon XIII, le pape du ralliement en 1892 : " Accepter la Constitution pour changer la législation." Sensibilité dont Christine Boutin pourrait aujourd'hui se revendiquer.
L'autre obédience prend son essor dans les années 1900 avec les royalistes de l'Action française, chantres du nationalisme intégral théorisé par Charles Maurras. Aisément endossé par la mouvance intégriste, cet héritage est représenté au sein du Printemps français par sa figure de proue, Béatrice Bourges.
Cette dernière a subi la forte influence d'Ichtus, émanation de l'association maurrassienne la Cité catholique. Son appel à une " résistance à la Gandhi éventuellement illégale" peut se décoder comme une allusion au célèbre distinguo, cher à Maurras, entre pays légal et pays réel.
Un feu de paille, le Printemps français ? Possible. En jouant la carte de la radicalité, en instrumentalisant la diabolisation médiatique dont elle est l'objet, cette galaxie catholique espère bien électriser et libérer de ses inhibitions une partie de la droite parlementaire.
Les passerelles existent, comme en témoignent les quelques députés UMP venus apporter leur soutien aux "campeurs" appréhendés le 14 avril devant l'Assemblée nationale. Avant de crier au retour des années 1930, ne faut-il pas d'abord y voir le signe d'une radicalisation politique comparable à l'exaspération antilaïque de la fin du XIXe siècle, lorsque la "République des Jules" luttait contre l'emprise du religieux sur le politique ?

samedi 20 avril 2013

De la Calligraphie Arabe au Graffiti,une infinie créativité!

Des codes anciens aux nouvelles expressions et revendications populaires.

Le graffiti est un véritable moyen d'expression. Il n'est donc pas étonnant que les murs des pays touchés par le « printemps arabe », soient couverts de messages exprimant la rage et la souffrance. Don Karl peint sous le pseudonyme de Stone depuis trente ans. En 2008, observant les mouvements dans les pays arabes et l'explosion de créativité qui en a découlé, Don Karl commence à rassembler les graffitis arabes
Le Graffiti arabe - Pascal Zoghbi & Don Karl - Editions Eyrolles 
Quatre ans plus tard, la compilation est devenue un livre qui contient des chapitres consacrés aux révolutions arabes. Parmi les artistes du monde entier présents dans ce livre, le Français Charles Vallaud a posé une des premières pierres à l'édifice. Sur les camions au Liban, dans les villages du Bahreïn, sur le mur de Cisjordanie, le virus du graffiti a touché le Moyen-Orient: un ouvrage réédité après le "printemps arabe" témoigne de cette formidable créativité calligraphique qui s'est aussi exportée en Occident..Les nombreuses photos du livre illustrent la vigueur de ce renouveau artistique qui est aussi un art de résistance. Le graffiti arabe s'affiche d'aileurs aussi dans les métropoles occidentales ou sur des accessoires de mode, comme ce sac à main créé par Sarah Beydoun, inspiré par les célèbres camions libanais.
Il exprime tantôt les souffrances d'un peuple, tantôt une recherche d'identité. A Beyrouth, Gaza, Téhéran, à Paris, Londres, Berlin ou Montréal, le graffiti traduit une pensée politique, sociale ou personnelle dans un style calligraphique et typographique très expressif, soulignent les auteurs.
Des spécialistes livrent dans l'ouvrage leur analyse des éléments traditionnels, des nouvelles approches et des contextes socio-culturels et politiques qui ont forgé les mouvements du graffiti au Moyen-Orient. Un chapitre sur le "printemps arabe" complète ce panorama.
L'ouvrage regroupe de nombreux artistes majeurs: Huda Smitshuijzen, Rana Jarbou, Tala F. Saleh, Houda Kassatly, William Parry, Hassan Massoudy, Malik Anas AIRajab, eL Seed, Hestl, Julien Breton, le collectif LightCraff, Sun7, Sadhu, L'ATLAS, Native et ZenTwO, Zepha alias Vincent Abadie Hafez ou encore Monsieur Cana alias Askar.
Au Moyen-Orient la bombe de peinture s’avère être la nouvelle arme très efficace.
Bansky, Palestine
Là où les conflits politiques et religieux fleurissent, les graffitis pacifiques prospèrent. Et pourtant, les graffitis peints la plupart du temps sur des murs de la rue sont loin d’avoir la côte question légalité..
Alors qu’Israël s’embourbe dans un conflit sans fin, nombre d’artistes occidentaux tels que Banksy, Blue, Swoon..- ont fait le déplacement pour appeler à la prise de conscience ou exprimer leur opposition au mur d’Israël. Mots et images dansent sur le mur afin de témoigner  le soutien de ces artistes envers le peuple enfermé. Véritable incarnation des remparts de prison, le mur est devenu le support de toute ode à la liberté et à la justice, plaidant pour davantage de tolérance et d’humanité. On peut y lire des citations de Shakespeare, de la Bible, de Gandhi ou encore de Nelson Mandela. D’autres graffitis, très simples, sont davantages touchants pour leur formule que pour le talent artistique qui en émane. 

Filippo Minelli, Palestine
En effet la sobriété des mots « CTRL + ALT + DELETE » peints en bleu ciel sur le mur près du checkpoint de Qalandiya par Filippo Minelli suffit pour que le message soit clair et saisissant. A Beyrouth, théâtre de l’interminable guerre civile libanaise et tout particulièrement marquée depuis quelques jours, le graffiti est le moyen d’expression pour les « refoulés » de l’expression orale. Ils ne peuvent pas être entendus, mais leurs pensées seront lues. Cela ne les empêche pas de signer ou de laisser entrevoir des commentaires politiques et sociaux sur les murs de la ville. Véritable outil de propagande pour les partis politiques, les marquages au mur comparables aux tags des gangs de New-York et Los Angeles, attestent de l’existence d’un parti dans un périmètre géographique particulier. Dès lors les passants sont informés de l’affiliation politique du quartier dans lequel ils s’aventurent.
La voix du peuple libanais n’est toutefois pas en reste. Vers la fin des années 1990, les oeuvres artistiques autres que dans un but de revendication politique, ont fleuri sur les murs orientaux de Beyrouth. Les premiers s’essayent sur des murs et surfaces à l’abri des regards tels que des usines abandonnées ou des parkings désertés… Par la suite, loin d’être considérés comme un acte de vandalisme au Liban, les graffitis largement inspirés de graffitis occidentaux ont pris leurs quartiers dans toute la ville de Beyrouth. Il faut dire que la calligraphie utilisée étant bien différente de la calligraphie arabe, elle n’est pas assez explicite pour être source de complications. Alors mis en confiance, les crews libanais se lancent et font fi des risques pour s’exprimer dans leur propre langue. C’est ainsi que le duo de hip-hop composé de frères jumeaux nommé « Ashekman » s’inspire des difficultés auxquelles leurs compatriotes sont confrontés, en utilisant une typographie arabe simplifiée pour écrire « la rue est à nous » qui indique leur contrôle des rues via leur art, ou encore « Gaza est dans mon coeur« .

Il semblerait que la prose des rues soit devenue un art qui se transmet au point que des ateliers graffiti sont même organisés à Beyrouth tels que « Spray Can Art, Culture is Dialogue » ou encore « Bombing Beyruth« . Pendant ce temps, Sens (Steffi Peichal), artiste allemande qui vit à Beyrouth et travaille avec des ONG, initie les plus jeunes à cet art de la 

revendication pacifique dans divers camps de réfugiés palestiniens du Liban.

Livré au regard de tous les passants à leur insu, le message-graffiti s’impose comme dernière tentative d’appel au rêve et à la revendication.
Par Maud Ducasse sur le site  Nomes design

The Revolution within yourself’, Ali, Yazan and Zepha, Beirut, 2012


Autre expression contemporaine de la calligraphie arabe, onirique, éphémère avec une technique sans trucage, le Light graff. Publié dans le "graffiti Arabe", un site sur le "Light graff" ou julien Breton alias kaalam.

Julien Breton , alias Kaalam



Focus Histoire:

Les graffiti arabes coufiques des premiers siècles de l’islam, en Arabie comme au Proche-Orient, représentent une source d’information inépuisable sur la société musulmane des origines. Toutefois, la datation des textes du ier/viie siècle, antérieurs aux Umayyades, reste problématique et doit se fonder sur des analyses paléographiques rigoureuses. L’étude du contenu des graffiti relatifs à la foi peut aider à dater ces textes du fait qu’ils connurent des phases progressives de développement. Les plus anciens graffiti datés de 23/643 et 24/644 ne contiennent pas de référence au religieux ; les auteurs, comme leurs contemporains, semblèrent plus intéressés de pérenniser leurs noms sur la pierre, s’inscrivant dans la tradition safaïtique. La question des premières professions de foi montre qu’il a existé des formulations archaïques antérieures à la shahâda traditionnelle, reflet d’un monothéisme tribal très matérialiste. Quant aux demandes de pardon récurrentes dans les graffiti, elles relèveraient d’une stratégie d’écriture. Enfin, la constatation de l’absence de citation du prophète Muḥammad dans les graffiti les plus anciens montre, à elle seule, les enjeux historiques et religieux de cette recherche épigraphique.

vendredi 19 avril 2013

La liberté de conscience, rien que la liberté!

«Si on a la vérité, on n’a rien à apprendre, rien à chercher, mais tout à contrôler et tout à juger »

«J'éprouve une invincible horreur pour tous les supplices et toutes les violences faites à l'humanité sous prétexte de servir ou de défendre la religion... L'inquisiteur espagnol disant à l'hérétique : la vérité ou la mort ! m’est aussi odieux que le terroriste français disant à mon grand-père : la liberté, la fraternité ou la mort ! La conscience humaine a le droit d'exiger qu'on ne lui pose plus jamais ces hideuses alternatives. »
"La liberté, rien que la liberté et la lutte rendue possible par la liberté" (1852) 
"La liberté telle que l’ont proclamée, recherchée, conquises ou rêvée les grands coeurs et les grandes nations de tous les temps, dans l’antiquité romaine comme depuis la rédemption, qui ne peut coexister qu’avec elle, mais dont la disparition fait trop souvent dégénérer l’autorité en despotisme".

"Encore une fois, je n’entend professer ici aucune théorie absolue, universelle, exclusivement applicable à tous les siècles et à tous les peuples. Je prétends seulement que, chez la plupart des peuples chrétiens, et dans l’état actuel du monde, la liberté est un bien, un bien relatif, non absolu. Sauf en ce qui touche aux lois directement établies et révélées par Dieu, je tiens que l’absolu est en tout l’ennemi de la vérité, telle qu’elle s’adapte à l’infirmité humaine [...] Je sais que j’ai contre moi la grande autorité de Bossuet, et j’en gémis. il vaut que le pouvoir des rois soit absolu, et il essaye de distinguer ce genre de gouvernement du gouvernement arbitraire. Ce soin qu’ont toujours pris les hommes de chercher des barrières à la souveraine puissance dans les diverses constitutions des empires et des monarchies, il l’appelle un vain tourment. (...)
Mais sur ce terrain là je proclame, sans crainte d’être démenti, que c’est à la liberté que nous devons en fait, le succès merveilleux et imprévu des intérêts catholiques [...] Ce n’est [...] ni l’Empire, ni la Restauration ; ce n’est ni la protection, ni la sympathie du pouvoir qui lui ont valu la force qu’elle possède aujourd’hui, le mieux relatif que chacun ressent, le progrès manifeste qui chaque jour se révèle. 
Qu’est-ce donc ? Il faut le dire : c’est la liberté, rien que la liberté, et la lutte rendue possible par la liberté." 

Charles de Montalembert, «Des intérêts catholiques au XIXe», in Le Correspondant, novembre 1852, repris in Oeuvres de M. le Comte de Montalembert, Paris, Lecoffre, T. V., 1860, pp. 56-57, 59-64 et 154.
 Association des amis de Charles de  MONTALEMBERT

mercredi 17 avril 2013

La Filiation Idéale et les Vertueux

"Un enfant n'a jamais les parents dont il rêve. Seuls les enfant sans parents ont des parents de rêve", Boris Cyrunlik

Il y a-t-il une filiation idéale? Qui la détermine?

Le droit "à l'enfant", le droit "aux parents idéaux", le droits des parents...
Ma connaissance du monde catholique classique et traditionnel, mes entretiens et débats m'amènent à poser ces questions et proposer cette réflexion prospective.
Quels sont les couples légitimes au droit à avoir des enfants? Qui évalue et comment évaluer cette légitimité?
 
1-Du "désir égoïste"
On entend  avec violence l'illégitimité éthique (en fait, morale) du "désir égoïste" de parentalité et filiation  des couples et parents homosexuels.
Le problème est-il ce "désir égoïste"? N'y a t il aucun désir égoïste dans les couples hétérosexuels? N'existe-t-il vraiment que chez les homosexuels?
Ce désir égoïste serait le  "problème intrasèque"  officiel, concernant la relation homosexuelle (car il serait une négation de l'altérité, est biologiquement stérile et ne correspondrait pas à notre culture historique) selon les catholiques.
Mais n'y a-t-il pas d'autres formes d'égoïsmes bannis dans l'Eglise? Celle-ci par exemple, considère le divorce comme un péché très grave d'égoïsme qui  excommunie de fait le couple catholique. Faudrait-il alors aussi revenir à l'interdiction du divorce dans la Société, qui permettrait une stabilité du foyer et donner sa chance, en amont, à l'enfant de ne pas être victime des égoïsmes parentaux? et donc revenir aux enfants illégitimes, les "bâtards"?...

Sur ce désir des parents, je réécris cette fin de lettre édifiante d'un homosexuel catholique engagé, Jérôme Musseau (Le Nouvel Obs),  adressé à l'évêque de Paris et les manifestants en Janvier dernier:"(...)Dimanche, Monseigneur, je prierai aussi pour les quelques milliers d’enfants et d'adolescents qui sont homosexuels et qui ne le savent pas encore, qui défileront dans les rues, emmenés par leurs parents, sûrs de les garder avec eux dans une forme familiale traditionnelle qui doit faire leur bonheur, en les faisant pour une après-midi les objets des désirs des adultes. Je prierai pour eux, en souhaitant qu’ils trouvent un chemin de libération et de bonheur, quelle que soit l’issue des débats en cours, quelle que soit leur famille."

Si l'on écoute bien, au fond des discours, les principes moraux sous-entendus des manifestants, il y aurait en fait  tant d'égoïsmes et de situations sentimentales, pathologiques, sociales, culturelles qui devraient  interdire une parentalité!
Finalement, le seul vrai couple tenable, l'idéal se vivrait dans un mariage catholique qui banni le divorce. Et si on laisser cette Eglise gouverner le pays, nous reviendrions à cette époque. Puisque le seul fait d'hétérosexualité ne suffira pas à ces manifestants catholiques comme gageure morale dans la filiation/famille idéale, comment prévenir et anticiper les dérives dans les couples?
 
2- Une solution, le permis de parentalité?
Quelle est donc la solution des manifestants? Une chasse aux sorcières morale?
Il n'est pas tout d'appeler au sang( Barjot, vendredi dernier) et d'imposer une théorie du couple idéal à la Société!

Demanderaient-ils de restreindre au seuls couples de bonnes moralités, moeurs, conditions sociales ou matérielles, le droit aux enfants?(en aparté, exit les célibataire pourtant qui ont déjà ce droit, sans que  F.Barjot, Boutin, Mrg23 n'aient manifesté).

On peut se rendre compte tout un chacun comme l'on est choqué parfois par l'irresponsabilité de parents, ou les doutes que l'on peut avoir sur de futurs parents...
Ce sont des questions sur les carences éducatives, affectives (handicapés, détenus, drogués, pauvreté). La DASS retire des enfants aux parents. Il y a des gles, des lois. La Chine dans sa politique de contrôle des naissances  accorde des droits et donne des pénalités (citadins/provinciaux) sur le nombre d'enfant par foyer. Sans compter les stérilisations chirurgicales subventionnées voir forcées ( sous couvert d'autres interventions,  comme en Afrique). 

Faudrait-il alors un permis de moralité pour accéder à la parentalité, justifiant des bonnes moeurs ou vertus afin de protéger, par avance l'enfant, risquant de vivre un calvaire , conséquences du désir égoïste des parents? Pour caricaturer volontairement, faudrait il castrer chimiquement  les gens "impurs"ou "indignes" si l'on ne peut les convertir ou contraindre (ou comme le dit Boutin, demander aux homosexuels de se marier dans une relation hétérosexuelle de façade, ce qui est abjecte de mensonge et de trahison, mais est-on étonné de ses propos...)?
Glissement vers une Société du "pré-crime" moral! Ira-t-on prévenir et déceler les perversions sexuelles, les incapacités matérielles, psycho, physico et culturelles avant un projet parental? Irons nous faire des analyses génétiques, tests psycho, enquètes de voisinage, verifier les diplômes,  fiches salariales et d'imposition comme pour l'éligibilité d'un locataire ou d'un emprunteur? 
On y arrivera un jour, et le pire est déjà là: certains "scientifiques" américains disent avoir découvert le gêne de l'homosexualité...Et comme pour ces mêmes, il s'agit d'une maladie dont la foi et la volonté peuvent guérir...

Peut-on interdire à l'Amour le désir d'enfant?
Quelles seraient les conséquences juridiques en cas d'infraction à leur loi?Une amende ou de la prison? La justice retirerait les enfants à leurs parents illégitimes?  
La loi est amorale, areligieuse, et protège le faible, sans distinction, par principe, en théorie (rien n'est parfait). Le discours du maire rappelle les responsabilités morales et juridiques  du couple quand il se marie. Cela suffit globalement. Et c'est la demande des couples homosexuels!

3-Police de la Vertu
Malheureusement ni la loi ni la religion n'arrêteront les perversions, d'où les limites de la peine de mort. Par contre, la chasse aux bonnes moeurs, elle, n'a jamais de limites. Demandez  à la police des "moeurs et de la vertu",  aux femmes saoudiennes...! Avec ironie, je dirai: Barjot à l'UOIF, c 'est "l'internationale obscurantiste"! Un jihad commun...?
"L'homme n'est ni ange, ni bête, et le malheur veut que qui veut faire l'ange fait la bête" nous explique Blaise Pascal dans ses Pensées. A force de déchirer  ou noircir les pages des revues de modes importées, aux douanes, , on se demande qui est le plus obsédé? Le peuple ou les censeurs? 
"Redoutable est la tentation d'être bon"(Bertolt Brecht)!
Ou sont passés la charité, la Miséricorde et la Paix chez ces manifestants catholiques? la confiance en l'Homme, malgré ses défauts? Le monde est il si manichéen pour eux? Condamné d'avance, figé? Les leaders des manifs enseignent aux jeunes le "bisounours  gender", monde binaire du Bien et du Mal. Ils en font des moutons immatures à ne plus penser (récurrents dans les manifestations). Sans leur donner des outils pour comprendre, affronter les subtilités et complexités des vies intérieures, de la psyché humaine , des relations humaines. Et ils en font surtout des bêtes à bien  voter!

Qui est égoïste, qui est violent dans cette dramaturgie de Société à occuper ou détourner les esprits? Un idéal moral de Société ne s'impose pas. Au mieux, il se propose et surtout commence, comme la charité, par soi-même. Sinon il finit dans un bain de sang comme toutes les Révolutions.
Ce sang appelé par un certain leader.

mardi 16 avril 2013

Que sont les Etudes de Genre ou Gender Studies?

« Ils ne sont pas nés de la chair et du sang, ni d’une volonté charnelle, ni d’une volonté d’homme : ils sont nés de Dieu. » Jn 1, 3

Pourquoi dire le mot "études de genre" plutôt que " théorie du genre?" 

Les études de genre ou gender studies sont un champ d'étude et de recherche interdisciplinaire consacré au genre et à la sexualité dans ce qu'ils ont de social, politique, anthropologique, historique, philosophique ou artistique.

Le genre est également un domaine d'étude dans de nombreuses disciplines, notamment l'art et l'histoire de l'art, mais également l'histoire, l'anthropologie, la sociologie, la psychologie ou la psychanalyse. Ces disciplines diffèrent parfois dans leurs approches et dans leurs raisons d'étudier le genre. Mais les études de genre peuvent également être considérées comme une discipline à part entière, au croisement de différentes autres approches disciplinaires.

De manière générale, les études de genre proposent une démarche de réflexion sur les identités sexuées et sexuelles, répertorient ce qui définit le masculin et le féminin dans différents lieux et à différentes époques, et s’interrogent sur la manière dont les normes se reproduisent jusqu’au point de paraître naturelles.


Le mot « genre » existe en français puisqu’il désigne, en grammaire, le masculin ou le féminin. Le genre de la grammaire nous apprend d’ailleurs que cette assignation d’un mot au masculin ou au féminin est affaire de convention linguistique, d’autant plus que dans d’autres langues (qui parfois font place à un troisième genre, le neutre), un mot français féminin sera masculin et réciproquement.

Les deux expressions« la théorie du gender », ou « la théorie du genre » ont été très souvent employées depuis 2011, notamment dans des articles relayant la polémique autour des manuels de SVT. Ces expression sont censées traduire gender theory, qui existe bel et bien en anglais. Cependant, la traduction par « la théorie du genre » (ou pire, « la théorie du gender ») est un contre-sens à plusieurs égards, la question étant: ce contresens est-il vraiment involontaire?

L’anglais theory ne se traduit pas toujours par « théorie ».
Le premier désigne, pour faire simple, la théorie par opposition à la pratique. On parlera ainsi d' "evolution theory" (la théorie de l’évolution), mais aussi de "computer theory" (qui n’est pas la théorie de l’ordinateur…) ou encore de "music theory" (l’ensemble des principes de la musique). Pour résumer, l’expression anglaise [nom] theory ne se traduit pas toujours par « théorie de [nom]», même si cette traduction apparaît comme la plus évidente.

Désigner une hypothèse par le terme « théorie » est une erreur bien installée, En français courant, usuel, le mot « théorie » désigne tout autant l’hypothèse (supposition à vérifier) que la thèse (l’affirmation vérifiée) qui contribue à la confusion.


Il faut donc s’interroger sur les raisons de traduire gender theory par « théorie du genre ». Dans un entretien publié sur le site Témoignage Chrétien, Anthony Favier, doctorant en histoire, explique que l’expression « théorie du genre » est employée par des catholiques. J’ajouterai seulement qu’à force d’être reprise de manière non critique dans les médias, elle s’est maintenant largement répandue.
"Il est important de préciser que seuls les catholiques utilisent l’expression « théorie du genre ». Dans le monde académique, les gender theories américaines n’ont jamais été traduites de cette manière – le mot français « théorie » impliquant une incertitude – on dit les « études de genre », ou « étudier le rapport de genre ». Dit Anthony Favier.
En effet, tous les discours polémiques catholiques contre les études de genre mettent l’accent sur le caractère philosophique, incertain et anti-scientifique de cette « théorie du genre », qui s’opposerait à la certitude des sciences exactes, c’est-à-dire de la biologie.. 
Ainsi, Mgr Tony Anatrella, qui a publié un livre (en italien) sur « la théorie du genre et l’origine de l’homosexualité », explique faireune analyse de la théorie du gender à partir des concepts de l’encyclique de Benoît XVI, Caritas in Veritate, qui permettent de souligner le caractère irréaliste et idéaliste de cette idéologie. [...] Le corps sexué n’est pas reconnu pour lui-même comme un « fait » à partir duquel le sujet se développe mais comme un artifice défini par la société. [...] Cette vision est complètement déconnectée du réel et entraîne une division entre le corps réel, qui lui est sexué au masculin ou au féminin (nous ne sommes que mâles ou femelles et pas autre chose), tout en étant nié, au bénéfice d’un corps imaginé en dehors de sa condition sexuée avec tout ce qui en découle. Pour la théorie du gender, le corps s’arrête à la hauteur de la tête [...].

Ces affirmations sont caractéristiques du discours polémique promu par les milieux traditionnalistes et conservateurs catholiques en ce qu’il oppose la « théorie », une « idéologie » « irréaliste et idéaliste », aux faits, au « réel », c’est-à-dire le corps dans son évidence sexuée. Précisons que les catholiques n’ont pas le monopole de ce genre de discours, j’aurai l’occasion d’y revenir bientôt.

Le choix de parler de « théorie du genre » n’est donc pas anodin: cette traduction a, en elle-même, un objectif polémique d’autant plus difficile à contrer qu’elle a l’air de s’imposer comme une évidence. L
e mot « théorie » a volontairement été utilisé avec abus par ses opposant pour mettre en avant les soit-disant côtés « fumeux » et sectaires de cette soit-disant « théorie »du lobby gay.
Propos recueillis sur le site 
http://cafaitgenre.org
 
Pour introduire la réflexion,  le blog d'Anthony Favier est une excellente base de départ: PENSER LE GENRE CATHOLIQUE

je vous invite à lire une partie d'une conférence de la théologienne catholique Veronique MARGRON pour une premières approche sur le sujet:
Le texte intrigue autant pour les pistes audacieuses de réflexion qu'ils lancent que les points qu'il laisse dans l'ombre. Pourquoi la différence homme-femme serait-elle plus constitutive de l'humanité que celle de classe ou de race ? Que se passe-t-il en dehors du couple hétérosexuel ? En dehors de la rhétorique, comment accède-t-on socialement une pareille dialectique entre "roc biologique" et histoire humaine ? L'altérité homme-femme est donnée comme impassable et ne semble résoluble qu'à travers l'épreuve du couple. Cela en viendrait-il pour autant à reconnaître qu'en dehors du couple la connaissance de l'autre n'existerait ? 
Sans se soumettre à la position de Freud qui voyait dans l'anatomie un destin, elle veut défendre une position chrétienne où le corps, "la chair", serait un donné indépassable mais qui s'inscrit dans une relation historique et de parole avec les autres. Il s'agirait d'une troisième voie entre un culturalisme à outrance - le sexe n'est que social - et un naturalisme forcené - l'anatomie déterminerait socialement le genre. (Anthony Favier)
 
(…)L'anatomie c'est le destin", écrivait Freud à propos du sexe féminin. Phrase terrible. Car tout ce qui fabrique du destin est un lieu d'échec pour les droits humains. Le destin est ce contre quoi l'humain ne peut rien. Fatalité du déterminisme, d'une puissance supposée extérieure à la volonté humaine. Bien loin de la conception chrétienne et de ce que nous apprennent les récits bibliques que nous avons essayé d'écouter. 

En effet, ce n’est pas l’humain qui choisit d’être homme ou femme. Il se trouve tel. Il vient au monde et à son histoire ainsi. Mais c’est la parole prononcée sur lui et celle que lui-même pourra affirmer qui lui permettront d’habiter pleinement ce qu’il est, et qui il est. La différence des sexes n’est pas un déterminisme mais la condition, d’une rencontre. Non la seule condition d’ailleurs. Car une fois de plus, la sexualité devient humaine grâce à la parole ajustée qui rend compte du respect, en quelque sorte du soin, de l’attention. Elle le devient aussi par la force - non violente - du désir de vivre et du désir de l’autre, qui rend possible de s’écarter de l’infans en nous. La différence des sexes n’est pas d’abord une construction sociale. Elle constitue l’humain qui est de l’un ou l’autre sexe. Cela n’interdit pas, culturellement, que du féminin habite l’homme et du masculin la femme. Là se situe la place des représentations, des transmissions, des cultures et la force de l’inconscient. Ce mixe entre le sexe et le genre n’est pas inné mais lié au langage. Et l’humain est le seul mammifère à être marqué tout en même temps par son histoire et par ce qui le constitue en arrivant au monde, un patrimoine génétique, un corps sexué, une constitution humaine.

La tradition chrétienne ne défend pas une nature immuable, scellée depuis toujours. Mais bien une relation serrée, incompressible, entre le donné de naissance et la place de la culture, du juste amour - ou non - des siens, de l’éducation, des drames vécus et de leurs traces dans les profondeurs de l’être. (...)
Avec l'inconnaissance entre homme et femme, la différence des sexes propose une démarche fondamentale pour vivre ensemble : la possibilité de croire. Chaque personne d'un sexe est ignorante de ce que l'autre est. Tu es toujours un autre, je ne te sais pas. Méconnaissance radicale essentielle au vivre ensemble car elle interdit - en principe ! - toute comparaison , puisque nul ne peut être à la place de l'autre. C'est grâce à cette incapacité, à cette limite principielle, que je peux accueillir l'autre dans son mystère. Je ne peux rien vérifier. Alors, le choix est entre croire et se défier. Entre consentir et aimer ce que je ne peux posséder ou avoir l'illusion, par le pouvoir, que je peux le prendre. 
Histoire de l'humanité que l'écart entre ces deux verbes. Histoires profondément rencontrées, déjà, dans les livres de la Bible. 
N'oublions pas que les deux différences fondatrices se croisent : celle du sexe et celle des générations. Le mystère que chacun des parents est pour l'autre doit pouvoir lui interdire de se prendre pour un "parent qui sait tout"(...) 
Hommes ou femmes ont le choix. Honorer, ou pas, leur ressemblance et leur différence par une altérité qui offre à chacun d'être estimé, aimé, dans le respect viscéral du corps de chair, fragile, unique.(…)


Le sujet est passionnant! D'une densité et complexité rare!
Genre et sexe ne s'opposent pas. Les reflexions se complètent, se superposent.
Comment répondre par un simple pour ou contre sur un tel sujet?
Combien il aura fallu de Conciles pour "fixer" la Nature du Christ...
En espérant toujours ouvrir le champ des connaissances dans la perspective "fides et ratio".
Et surtout, surtout!, sortir des polémiques et raccourcis obscurantistes!