dimanche 7 avril 2013

Abed Azrié, Musicien et Magicien de la Rencontre Arabo-Andalouse!



SUERTE

Su mirada es vino
Su mejilla un huerto
Su boca es coral
Attayan su cuerpo
Su palabra es cierta
Su amour paraiso

 Como en  un ollar en su cintura
Engarzan mil joyas de hermosura
Ramo, sol de suerte, media luna
Ramo, sol de suerte, media luna

Funde las miradas cuando sale
El manto del sol de su semblante
Alba que jamas muere en la tarde


Son regard est ivresse, 
Ses joues, un verger.
Sa bouche est corail,
Son corps, basilic.
Sa parole est véritable, 
Son amour, paradis.

Tel un collier, sa taille
Est ciselée de beautés:
Rameau, croissant de lune, 
Soleil de bonne fortune.
Visage revêtu de soleil, 
Il apparaît
Et éblouit les vivants:
Matin qui n'a jamais de soir.

(texte andalous du XIe siècle)

           De cette suite arabo-andalouse datant du XIe siècle, le musicien franco-syrien a déjà livré deux versions, dont celle, en 1998, avec le chanteur Serge Guirao. L’arrière-pensée fondatrice de cette œuvre est de rétablir le dialogue interrompu entre les mondes musulman, juif et chrétien en remontant par le chant à l’âge d’or de la convivance religieuse, philosophique et artistique que fut l’Andalousie médiévale des Almoravides et des Almohades.

Sa valeur proprement artistique tient à la fusion entre trois entités musicales de haute tenue, l’une arabe, l’autre espagnole, la troisième française, et à l’accord parfait réalisé entre la voix à l’austérité passionnante d’Azrié et celle de la cantatrice Ana Felip. Au cœur d’un répertoire qui louvoie entre le galant et le mystique, et par-delà les différences de langues et de nuances musicales où se mêlent intimement flamenco et muwashshah, se dénude alors comme un désir sensuel la conscience que l’unité de l’un n’est possible qu’avec l’autre.

Dans la composition de 'Suerte' l'objectif d'Abed Azrié était de saisir la montée fortuite de cette énergie mystérieuse qui traverse le corps au moment musical, phénomène connu dans la culture espagnole sous le nom de "duende" et dans la culture arabe sous celui de "tarab". L'effet s'exprime dans une approche intérieure et dense de la civilisation arabo-andalouse, née de la fusion des mondes antiques et médiévaux, des cultures chrétienne, juive et musulmane.

En quête de l'âme andalouse, la musique met en scène deux voix d'homme et deux langues. Les traditions orales et écrites se confondent et se conjuguent en reliant trois instrumentations : arabe, flamenco et occidentale. Fusion du temps d'autrefois avec le présent absolu, l'univers évoqué par Suerte - «La bonne fortune» - est aussi une célébration de l'amour, la danse, la joie et surtout la femme.

La musique d'Abed Azrié retrouve ses sources venant du passé afin d'arriver à une synthèse entièrement moderne. Abed Azrié a sélectionné pour les paroles des chants une série exquise et raffinée de muwash'shahât, poèmes andalous du XIe siècle, dont la plupart sont anonymes. Cette forme multirime et multimètre est née en Espagne vers le IXe siècle et signifie au départ «mantille brodée symétriquement de perles et de bijoux dont la femme se pare». Création souvent populaire en langue arabe, élaborée dans un style simple, transparent et spontané, le muwash'shah est contemporain des chants des troubadours et de trouvères de l'Occident médiéval, dont il partage la délicatesse et les thèmes. Traduit en espagnol, il exalte la dualité des cultures et fournit l'occasion de transcender le sens par la pure musicalité. Bernard Moussali, historien des musiques orientales.

Qui est Abed Azrié:

« Ne lui demandez pas sa nationalité ! Abed Azrié a passé toute sa vie à se débarrasser d’être d’ici ou d’ailleurs. Il est musicien. Ses partitions sont sa seule identité ; les textes qu’il chante, les instruments de sa propre quête. »

« Pour la musique, le chant, fidélité d’en deçà et de toujours, merci Abed Azrié. »
René CHAR.


Un  très bon site sur la musique Flamenco et andalouse, vous trouverez:


Pour aller plus loin:

Le muwash'shahât, poèmes andalous du XIe siècle, expliqué par le professeur Saadane Benbabaali, Maître de conférences à l' Université Paris 3 - Sorbonne Nouvelle où il enseigne la littérature classique arabe.

Persistance et évolution du Muwashshah, article de S. Benbabaali


Poetic License - Lyrical Forms and Syncretic Fusion in al-Andalus, By Daniel Harvey Pedrick

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